Streaming musical : qui touche vraiment l’argent de vos écoutes ?

Le streaming règne aujourd’hui sur l’industrie musicale, mais derrière cette révolution se cache un système de rémunération complexe. Alors que les plateformes se multiplient et que les modes de consommation évoluent, les mécanismes de distribution des revenus restent souvent méconnus du grand public et parfois des artistes eux-mêmes. Comment fonctionne réellement ce système et quelles solutions existent pour garantir une meilleure équité ?

Le modèle Prorata dans le streaming musical actuel

Le modèle dominant dans l’industrie du streaming musical repose sur un système appelé « Prorata ». Son fonctionnement est relativement simple dans son principe : les revenus mensuels générés par les abonnements et la publicité sont rassemblés dans un pot commun. Ces sommes sont ensuite redistribuées aux différents ayants droit (labels, distributeurs, artistes, éditeurs) proportionnellement au nombre d’écoutes globales. Ce système favorise naturellement les artistes qui cumulent le plus grand nombre d’écoutes, créant ainsi un déséquilibre notable entre les têtes d’affiche et les artistes moins connus.

Interview réalisée en partenariat avec le studio Le264

Les causes de l’opacité dans la rémunération du streaming musical

L’opacité qui caractérise la rémunération des artistes s’explique par plusieurs facteurs structurels. D’abord, des clauses de confidentialité régissent les contrats entre plateformes et distributeurs, empêchant toute transparence sur les reversements exacts et les conditions négociées. Ensuite, la diversité des contrats artistiques génère des différences significatives de rémunération, même au sein d’un même label. Sans oublier une chaîne de valeur particulièrement morcelée avec de nombreux intermédiaires, chacun prélevant une part à chaque étape du processus, sans que la composition exacte de ces prélèvements soit toujours connue.

Premium versus Freemium : impact sur les artistes

La différence entre les modèles premium et freemium est considérable en termes de retombées financières pour les artistes. Le modèle premium, basé sur des abonnements payants, rémunère entre trois et cinq fois plus que le freemium. Ce dernier, principalement financé par la publicité, sert davantage à attirer des utilisateurs dans un écosystème avec l’espoir de les convertir ultérieurement vers une offre payante. Les genres de niche comme le jazz ou le classique peuvent toutefois tirer leur épingle du jeu en se tournant vers des plateformes aux audiences plus restreintes mais plus engagées, où la qualité d’écoute et la fidélité compensent le manque de volume. Ces genres bénéficient également d’une éditorialisation plus riche avec des articles, interviews et playlists curées par des experts.

Les innovations pour une rémunération plus équitable

Plusieurs pistes d’amélioration émergent pour répondre aux défis de la rémunération. Le modèle « artiste-centrique » testé par certaines plateformes vise à redistribuer l’argent directement aux artistes écoutés par chaque abonné, plutôt que via un pot commun. D’autres innovations incluent des rémunérations progressives ou basées sur la blockchain. Ces expérimentations s’accompagnent d’efforts accrus pour améliorer la transparence et impliquer tous les acteurs de la chaîne dans la recherche de solutions. Un consensus semble néanmoins se dégager : le modèle d’abonnement payant reste le seul véritablement viable et équitable à long terme, marquant potentiellement la fin de l’ère du « tout gratuit » qui, malgré son rôle dans l’acculturation aux usages numériques, montre aujourd’hui ses limites.

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