« Seul on va plus vite, en équipe on va plus loin »
Ingénieur de formation, père de deux enfants, Olivier Berrouiguet est le CEO de Synertrade, filiale du groupe Econocom spécialisée dans les solutions digitales Source-to-Pay (le processus achats-finance). Avec ses 400 000 utilisateurs, l’entreprise conquiert des parts de marché avec un objectif de 23 millions d’euros de chiffre d’affaires cette année. Spécialiste du redressement d’entreprises, Olivier Berrouiguet est l’artisan de ce succès. Rencontre.
Pouvez-vous nous résumer votre parcours académique et professionnel ?
O.B : J’ai 53 ans, je suis ingénieur de formation (ndlr : il est diplômé de l’Ecole Universitaire d’Ingénieurs de Lille et d’un Master Business Unit Administration HEC). J’ai rapidement opté pour une carrière de business développement et commerce, d’abord chez Merck. J’ai toujours été attiré par le multi-pays : j’ai grandi en Suisse, dans le Sud-Ouest de la France et en Grèce. J’aime côtoyer différentes cultures. J’ai travaillé dans une vingtaine de pays en Europe, Asie et aux Etats-Unis.
Quelle est votre première expérience en redressement financier ?
O.B. : Ma première expérience en management s’est faite avec une équipe de quatorze personnes sur un sujet de redressement et de retournement d’entreprise chez Taylor Hobson. Le plan qui visait à être plus rentable a bien fonctionné. J’ai d’abord travaillé sur la dynamique collective d’une équipe qui avait souffert, et c’est à ce moment-là que j’ai appris l’adage : « Seul on va plus vite, en équipe on va plus loin ». Parce que manager c’est déléguer, faire confiance et accepter les erreurs que l’on va affronter ensemble. Et puis l’entreprise a été rachetée cinq ans plus tard par le groupe Ametek. Ensuite, j’ai intégré une start-up en 2006, Sensitive Objects, spécialisé dans le tactile, au poste de directeur des ventes. Et j’ai assisté aux premiers succès de cette start-up, à la copie de notre brevet par une entreprise américaine puis à sa vente.
« Manager c’est déléguer, faire confiance et accepter les erreurs que l’on va affronter ensemble »
Ensuite vous avez intégré Capgemini en 2009 ? Dans la branche IT ou conseil ?
O.B : Dans la branche IT, j’étais le Global Account Manager de Sanofi pour Capgemini. J’avais un goût pour la pharma depuis mon expérience chez Merck et je me suis concentré sur le fait de concilier les besoins business avec la réalité IT de Sanofi. A mon arrivée, le compte était en décrépitude, et finalement, avec mon équipe qui était composée de 5 personnes, nous avons multiplié par 13 le chiffre d’affaires du compte en 4 ans.
En 2017, vous fondez votre entreprise, My Cube, qu’est-ce qui vous a motivé ?
O.B : Juste avant mon expérience entrepreneuriale, j’ai rejoint Voluntis pendant 5 ans, c’était une très belle aventure comme directeur commercial d’une entreprise éditrice de logiciels médicaux. J’y ai fait la plus belle affaire de ma carrière en emportant un deal de plusieurs millions de dollars à partir de deux slides synthétisant la valeur générée par notre solution ! Et en 2017 j’ai créé My Cube en effet : je me suis appuyé sur mon expérience en santé numérique pour proposer à mes clients des prestations de service dans la vente et la définition de leurs cibles.
Vous avez fait cavalier seul dans cette aventure entrepreneuriale ?
O.B. : Absolument, j’ai failli m’associer mais la personne qui devait me rejoindre a finalement pris un travail à plein temps.
Et qu’est-ce qui vous donne envie de rejoindre Econocom en 2018 ?
O.B : L’aventure en équipe ! Je voulais retravailler avec des équipes et un ancien de chez Capgemini, Laurent Roudil, m’a convaincu à l’époque de rejoindre Econocom. Je suis arrivé en tant que directeur des comptes stratégiques, puis je suis passé directeur des deals stratégiques. Aussi, Econocom m’a laissé la latitude pour la gestion d’un projet entrepreneurial global : avec Synertrade depuis l’été 2021, j’ai repris le mandat social des six entreprises (France, Allemagne, Italie, USA, Roumanie et Espagne).
Vous arrivez à la tête de Synertrade avec quels objectifs ?
O.B : Quand je suis arrivé, on avait un problème de rotation des équipes, de vacance du pouvoir et de désorganisation de l’entreprise : mes objectifs ont été d’écrire la partition, c’est-à-dire notre plan de redressement sur 3 ans, de redresser et de retourner l’entreprise qui est spécialiste du logiciel d’achats.
Combien de salariés compte Synertrade ? Quelle a été l’évolution du chiffre d’affaires depuis votre arrivée ?
O.B : Nous sommes 150 personnes. Nous sommes passé de 12 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2021 à 16,7 millions en 2022. En 2023, nous avons une ambition de 23 millions, j’espère que l’on fera plus ! Nous sommes notamment revenus dans le classement Magic Quadrant de Gartner 2022, et sommes devenus leader du Quadrant Matrix 2023 solutions SRM (Supplier Risk Management), ce dont je suis très fier, et nous allons être en bonne place en 2023 dans les classements.
Belle performance ! Que pensez-vous de l’état de votre marché ?
O.B : Le marché du e-procurement pèse 8 milliards d’euros dans le monde, dont la moitié est aux Etats-Unis et un tiers en Europe. Le marché est tracté dans sa croissance par les Etats-Unis où l’on projette 20 % de croissance annuelle sur les 3 années à venir, du fait de la multiplication des risques mondiaux qui se répercutent sur les achats : l’inflation bien sûr, le shortage, c’est-à-dire les ruptures de produits bruts ou semi-finis, les risques régionaux et la désorganisation des supply chain sont de puissants leviers de croissance. Par exemple, il va être plus compliqué d’acheter certains composants en Chine, les Etats-Unis interdisent tous les produits Huawei sur le territoire, etc. En Europe, la forte accélération des enjeux RSE donne de très belles opportunités pour les leaders comme nous des solutions SRM (Supplier Risk Management ) : nous venons de gagner en Juin face à tous nos concurrents européens et américains la gestion des risques fournisseurs du groupe Auchan. C’est une grande fierté pour toute l’équipe, et le gage de succès futurs !!
Quel manager êtes-vous ?
O.B : J’essaye d’être le chef d’orchestre qui écrit et joue la partition, avec une très bonne exécution des équipes. Il ne faut pas oublier que 95 % de la valeur vient d’une très bonne exécution. On devient excellent quand on est très bon en innovation et très bon en exécution. Je suis favorable à une culture de la flexibilité qui s’ancre dans les résultats. Les équipes ont été très heureuses de célébrer notre performance l’année dernière, et j’en suis très fier.
« 95 % de la valeur vient d’une très bonne exécution »
Quels sont les ressorts de ce succès ?
O.B : Je crois que nous n’étions pas maîtres de notre produit, et donc pas maître de notre destin. Nous nous sommes comportés comme une entreprise de services alors que nous sommes fondamentalement une entreprise de produits – produits dans lesquels il y a de l’intelligence et du savoir-faire embarqués. Nous avons repris le contrôle de notre destin stratégique et financier grâce à notre plan de redressement, avec un produit dont nous sommes maîtres grâce à une vision claire de notre valeur ajoutée sur les sujets de gestion des risques achats et d’efficacité de la fonction acaht au service des métiers.
Une question pour conclure : des hobbies ?…
O.B : Je joue au paddle, moins exigeant que le tennis, mais un sport très agréable. J’ai piloté des petits avions, et mon projet est de passer un jour aux hélicoptères !
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